Chers paroissiens et paroissiennes,

Après une année de confinement, à quoi ressembleront nos vacances? Cette année, contrairement aux années passées, nous n’avons pas le goût de ne rien faire. Nous voulons plutôt faire ce que nous n’avons pas pu faire: sortir de chez soi, aller voir des amis, nous rassembler, fêter, rire, chanter. En fait, nous éprouvons un immense désir de liberté. Cyrano de Bergerac, personnage fictif né de la plume d’Edmond Rostand, a su traduire en mots ce souffle d’émancipation. Cyrano se voit offrir d’avoir un protecteur, sorte de commanditaire, auquel il serait redevable. Il refuse cette dépendance. Il conclut sa célèbre tirade des « non, merci! » de la façon suivante:

« Mais…chanter, rêver, rire, passer, être seul, être libre,

Avoir l’oeil qui regarde bien, la voix qui vibre,

Mettre, quand ii vous plaît, son feutre de travers,

Pour un oui, pour un non, se battre ou faire un vers!

Travailler sans souci de gloire ou de fortune

À tel voyage auquel on pense, dans la lune!

N’écrire jamais rien qui de soi ne sortit,

Et, modeste d’ailleurs, se dire: mon petit,

Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles,

Si c’est dans ton jardin à toi que tu les cueilles!

Puis, s’il advient d’un peu triompher, par hasard,

Ne pas être obligé d’en rien rendre à César,

Vis-à-vis de soi-même en garder le mérite,

Bref, dédaignant d’être le lierre parasite,

Lors même qu’on n’est pas le chêne ou le tilleul,

Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul!

 

Je vous souhaite des vacances à la Cyrano, empreintes d’une liberté quasi arrogante, à défier la déprime qui a assombri nos vies depuis un an. Je vous souhaite de chanter, de rire, d’écouter de la musique, d’observer les oiseaux, de lire un roman, de boire du vin ou une sangria. Tiens, je vous fais une suggestion pour prier autrement. Assoyez-vous dans le jardin. Sortez deux verres à vin: un pour vous, l’autre pour le Seigneur. Versez un peu de vin dans les deux verres et imaginez que vous êtes en train de parler avec le Seigneur. D’abord, portez un toast à tout ce qui a été beau et bon durant la dernière année. Puis, parlez au Seigneur comme s’il était attablé avec vous au bistrot. Que lui raconteriez-vous s’il était là, à côté de vous, à vous écouter? C’est ça, prier.

Bonnes vacances, Cyrano.

Alain Roy, curé